Les 1231 critiques de Thierry Bellefroid sur Bd Paradisio...

« La chute de la dynastie Raja », tome 1 de « La malédiction », par Diviné. Chez Hors Collection.

A côté des valeurs sûres et principalement américaines de son catalogue (dont l'excellent « Calvin & Hobbes », ou les très drôles « Bébé blues » et « Une vie de chien »), Hors Collection tente de lancer quelques séries plus classiques. Se référant abondamment à l'univers de Tintin dans sa présentation, l'éditeur prend des risques. Il en prend d'autant plus qu'il s'agit d'un premier album, ce qui rend toute comparaison avec l'oeuvre d'Hergé quasi inutile. La ligne claire, d'abord. Le dessin de Pierre-Christophe Diviné n'est pas exempt de défauts, et c'est normal puisqu'il est débutant. Mais s'il doit ressembler à celui d'un autre dessinateur, ce n'est certainement pas à Hergé qu'on pense. Plutôt à Sterne, dont il est très proche. L'histoire, confuse et tortueuse, oblige quant à elle le lecteur à un effort de concentration pour ne pas décrocher. Heureusement que l'humour vient rafraîchir tout ça. Le récit raconte sur deux époques à la fois la chute annoncée d'une dynastie ; il est paradoxalement aussi difficile à suivre qu'attendu. L'originalité vient de l'univers népalais décalé imaginé par l'auteur (qui vit à Katmandou) et des profils très peu conventionnels des personnages.
Super par Thierry Bellefroid
« Super » de Baladi. Chez Atrabile.

Alex Baladi au mieux de sa forme. Avec « Super », l'auteur genevois nous donne un récit subtil, intelligent et original. On croit lire l'histoire de triplés surdoués. C'est un peu de ça qu'il s'agit, en effet. Mais Baladi se sert d'eux et de son histoire pour explorer des thèmes plus graves et plus métaphysiques avec l'air de ne pas y toucher. Conçu comme une pièce de théâtre, son livre est une plongée au coeur de la solitude et de l'absence. Difficile de résister. C'est beau, triste, profond, dessiné à l'économie, avec un sens consommé de la concision et du détournement de genre. Bref, on en redemande.
Merci Ben Laden ! par Thierry Bellefroid
« Merci Ben Laden ! », par Willem, aux Requins Marteaux.

Vous aimez les dessins de Willem dans Libé ou dans Charlie-Hebdo ? Alors, précipitez-vous sur ce petit recueil paru dans la collection « Carrément » des Requins Marteaux ! Willem s'en donne à coeur joie sur le thème de Ben Laden contre Dobeliou. C'est totalement réjouissant, iconoclaste, politiquement non correct, bref... comme on aime, quoi. Tout le monde en prend pour son grade : les Américains, bien sûr, mais aussi les Afghans, les militaires, les terroristes et tous les donneurs de leçon de tactique en général. Mention spéciale pour le « dico illettré : tous les mots entendus à la radio, enfin rendus lisibles comme on les prononce ». En clair, Willem s'amuse à dessiner les lettres de ces mots ou expressions pour leur donner un sens plus proche de la réalité. Par exemple, le mot « riposte » ; les 7 lettres composant le mot sont dessinées en forme de ruines de Kaboul.
Sillage - tome 5 (Sillage) par Thierry Bellefroid
le tome 5 de Sillage, par Morvan et Buchet. Chez Delcourt.

Chaque album de Sillage est, on le sait, l'occasion pour Jean-David Morvan d'aborder un genre différent. Le voilà aux prises avec une histoire de terroristes et de prise d'otage qui pourrait donner lieu à une grande leçon de manichéisme. Fort heureusement pour le lecteur, il n'en est rien. Les preneurs d'otages et les terroristes sont présentés comme la race inférieure du convoi qui milite pour le droit minimum à la dignité. Morvan s'attache donc à démonter le mécanisme du sacrifice et de la violence politique. Il ne rate pas sa cible, ce qui n'empêche nullement l'album de connaître son lot de rebondissements, de moments tendres ou émouvants. Bref, un parcours sans faute, si ce n'est que parfois, Nävis en fait décidément trop. Rien à faire, jouer avec les bons sentiments est toujours dangereux et à force de vouloir comprendre et aider ses ravisseurs, la charmante humaine du convoi est parfois un peu trop « comme il faut ». Hormis ce petit bémol, il faut bien constater que la série ne faiblit guère, y compris graphiquement. Buchet maîtrise parfaitement son univers et réussit aussi bien les scènes d'action où Nävis joue les Rambo que les scènes de bidonvilles. Décidément, Sillage est bel et bien le Valérian des années 2000.
« D'ombres et de lumières », tome 1 de la série Marshall, par Filippi et Tello. Aux Humanos.

Si tous les éléments qui se trouvent dans l'argumentaire de l'éditeur se trouvaient aussi dans la BD, elle serait assurément d'une lecture plus digeste. Filippi (scénariste de « Orull, le souffleur de nuages », de « Un drôle d'ange gardien » ou encore du « Livre de jack ») nous balance en effet un univers de SF régi par des codes et des castes dont il ne nous dit à peu près rien. Le lecteur met du temps à comprendre ce qui se passe réellement dans cette histoire menée tambour battant autour d'une héroïne intrépide et de son ingénieux apprenti. Bon, on sait très vite qui sont les bons et qui sont les méchants, on sait aussi qu'il y a une histoire de complot à grande échelle, mais pour le reste, on nage quand même à contre-courant pendant pas mal de pages. Ce qui ne veut pas dire que la lecture de ce premier tome soit à déconseiller. Les personnages principaux (Hisaya, Tetsu et le grand-père) sont attachants. Un univers qui doit beaucoup au dessin du jeune Jean-Florian Tello, dont c'est la première publication. Quelque part entre Thierry Robin, Varanda, Boiscommun et Ciro Tota, Tello ne renie pas ses influences, mais développe un style personnel privilégiant la fluidité à l'effet et la pureté des lignes à la surcharge. Il donne une âme à cet album un peu trop manichéen mais prometteur.
Bazooka Twist (Les teigneux) par Thierry Bellefroid
« Bazooka Twist », tome 1 de la série « Les Teigneux », par Chanoinat et Castaza. Chez Soleil.

Il y a deux sortes de préfaciers. Ceux qui n'ont pas pu refuser et qui cachent leur enthousiasme du mieux qu'ils peuvent (au point qu'on se demande, parfois, pourquoi on leur a demandé d'écrire) et ceux qui ont une vraie raison de se réjouir. Georges Lautner fait partie de la seconde catégorie et on ne s'étonnera pas, à la lecture de cet album, qu'il ait été si dithyrambique dans sa préface. « Les Teigneux » arrivent à faire ce que leurs prédécesseurs n'étaient pas parvenus à réaliser : rivaliser avec le cinéma d'Audiard. A part dans « Les ailes de plomb » de Gibelin et Barral (Delcourt), je ne m'étais pas régalé comme ça depuis Gil Jourdan ! Et même si certains esprits chagrins trouveront qu'on a assez de films en noir et blanc à voir ou à revoir dans ce genre purement polar-franchouillard, je leur répondrai de lire « Les Teigneux » du premier au dernier phylactère avant de rendre un avis définitif. Chanoinat a dû revoir plus de cinquante fois ces films des années 60-70 dans lesquels le père Blier donnait la réplique à Gabin, Denner, Constantine et tous les autres. Quel dialoguiste ! On en oublierait de parler du scénario. De fait, on a presque envie de dire qu'on s'en fout. Il ne casse pas des briques mais il tient suffisamment debout pour ne pas compromettre la lecture de cet album. Quant au dessin de Castaza (« Khatedra »), il n'évite pas les maladresses et pioche abondamment dans les tronches du septième art.
L'atelier par Thierry Bellefroid
« L'Atelier », d'Etienne Davodeau. Chez PMJ.

Après avoir été jusqu'au bout de ses envies en tentant le reportage BD (« Rural ! »), voilà que le « Ken Loach de la BD » nous surprend avec un carnet de bord réalisé à main levée, dans l'intimité de son atelier. Rien à voir avec les affres de la création ou les petits secrets du dessinateur de BD vus par lui-même ; avec humour, légèreté et beaucoup de simplicité, Davodeau parle de la vie au quotidien d'un auteur de BD qui est aussi -et surtout- un père et un mari. Dans l'atelier, font tour à tour irruption ses deux filles et sa compagne. Et l'auteur s'amuse à mettre en abîme ces petites rencontres au quotidien, jusqu'à risquer un exercice de haute voltige où l'on ne sait plus trop où est la réalité et où commence la création. Qui influence qui ? Qui prononce réellement les phrases contenues dans les phylactères : les personnages de papier qui observent leurs modèles ou les véritables filles de Davodeau dont le père capte au vol les réactions ? Drôle, original, décalé, « L'atelier » est d'une fraîcheur et d'une spontanéité qui manquent trop souvent dans la production actuelle. Un petit livre à ne pas rater !
« La tentation, carnet de voyage au Pakistan, 1ère partie ». Par Renaud De Heyn. A La Cinquième Couche.

Oubliez ce que vous croyez savoir de l'Iran et du Pakistan (sauf si, comme l'auteur, vous les avez traversés). Renaud De Heyn a tenu au fil des mois un carnet de bord mi-dessiné mi-raconté dont il a sélectionné quelques pages concentrées et magnifiques. Le voyage entrepris en 95 qui devait le mener de la Turquie à la Chine en 13 mois lui a permis de passer quelques semaines en Iran avant de rester trois mois au Pakistan. Son envie : mieux comprendre un fondamentalisme islamique qu'il redoutait avant son départ. Dans ce carnet de bord plein d'anecdotes, il raconte son cheminement vers une plus grande vérité, de l'autre côté des idées reçues et des clichés. C'est non seulement un beau parcours humain, mais c'est en outre admirablement raconté et dessiné avec un réel talent. Pour quelqu'un qui n'avait jamais publié de BD, on peut dire que ce premier album est plus qu'un ballon d'essai !
08/09/2000 par Thierry Bellefroid
« 08/09/2000 » de Jean-Dominique Alvès. Chez Amok.

Alvès développe une musique qui ne laissera pas les amateurs de littérature indifférents. Un ton personnel, proche du polar noir mais en plus mécanique, avec des refrains lancinants et des phrases aiguisées comme des couteaux de boucher. Par dessus -ou par dessous, on ne sait pas trop-, il place ses dessins volontairement pixélisés. Le résultat est un choc, pour les yeux comme pour l'esprit. On cherche parfois vainement la correspondance entre les deux niveaux de lecture. Le texte ne dit pas tout mais l'image non plus, si bien qu'au bout du compte, c'est encore l'imaginaire du lecteur qui comble les trous. Alvès décrit un monde noir où pendus et avaleurs de débris de verre mâchent de la même manière l'affreux chewing gum de la vie.
La belle et les bêtes (Garulfo) par Thierry Bellefroid
« La belle et les bêtes », tome 6 de la série Garulfo. Par Ayroles, Maïorana et Leprévost. Chez Delcourt.

Le deuxième cycle de cette excellente série s'achève sur un album aux qualités indéniables, même si l'on doit reconnaître que le projet perd un peu de son souffle au fil du temps. Les deux premiers albums constituant le premier cycle étaient plus ramassés, plus étonnants, et restent par conséquent plus aboutis à mes yeux. Mais ne boudons pas notre plaisir : la verve d'Alain Ayroles et le talent de Bruno Maïorana nous offrent quelques moments d'anthologie dans cet album de conclusion et la seule scène des planches 26 à 30 mérite largement l'investissement. Comme toujours, Ayroles cisèle ses dialogues. Il passe avec brio de la comédie romantique au film d'action et du conte de fées à la parodie. Son petit Poucet revisité en fait ici la démonstration. Quant à Maïorana, il parvient à transcender la moindre scène d'action pour en faire un dessin animé sur papier, ce qui est tout de même un sacré défi. On regrettera peut-être quelques longueurs, surtout si l'on considère les deux derniers albums (le tournoi prend beaucoup de place...), mais il y a tant de talent dans l'ensemble qu'il serait stupide de commencer à comparer les qualités des albums pris séparément. Ce n'est pas le tome 6 qu'il convient de lire, en effet, mais bien toute la série.
Trois larmes pour Lucie (Dusk) par Thierry Bellefroid
« Trois larmes pour Lucie », tome 2 de la série Dusk. Par Marazano et de Metter. Aux Humanos.

La qualité graphique de la couverture ne trompe pas sur la marchandise. Non seulement le dessin de de Metter reste passionnant de bout en bout, mais l'histoire policière imaginée par Marazano place cet album un ton au-dessus du précédent. Le thème abordé est scabreux : une enquête à propos d'un crime commis sur un pédophile dont la fille anorexique pourrait bien avoir été une des victimes. Beaucoup de scénaristes se seraient cassé les dents sur un sujet pareil. Surtout avec un trio d'enquêteurs comme celui-là. La descente aux enfers alcoolique de Solomon est traitée avec réalisme et intelligence. Quant à l'attirance grandissante de Joe pour l'exorcisme et le travail tout en finesse d'Anna avec la jeune anorexique, ils confirment que Marazano se plaît à mêler son enquête à un subtil portrait psychologique de flics « en marge ». C'est noir, parfois malsain mais toujours dense. Seul reproche, peut-être, l'omniprésence des textes qui nuit, parfois, à l'expression du talent de de Metter. Certaines pages sont réellement trop chargées. C'est dommage. Il faut dire que le dessinateur a un style, une griffe. Son réalisme pictural est à la fois enlevé et précis. Son pinceau est un peu comme un scalpel dans les mains d'un chirurgien expérimenté. Il mérite d'avoir de la place pour s'exprimer.
Jolie mer de Chine par Thierry Bellefroid
« Jolie mer de Chine », par Loustal et Coatalem, chez Casterman.

Sept ans après leur parution chez Grasset, deux nouvelles de Coatalem sont adaptées en BD par Loustal dans ce très bel album. Les deux hommes se connaissent bien. La première couverture réalisée par le dessinateur pour le romancier remonte à la fin des années 80. Mais contrairement à son habitude, cette fois, Loustal n'a pas demandé un scénario ou un synopsys à son complice du moment. Il a purement et simplement adapté une matière existante. Le défi était de taille car il s'agissait de préserver l'essence des nouvelles de Jean-Luc Coatalem. Non seulement Loustal y parvient. Mais en plus il garde des dialogues savoureux qui privilégient davantage l'effet direct, la relation entre les personnages. Après des albums souvent marqués par des textes off très présents, la langue de Coatalem est plutôt réjouissante dans ce nouveau Loustal. Le dessinateur en profite pour effectuer une mise en scène proche des personnages. Ceux-ci évoluent dans un décor de paquebot des mers chaudes sans trop savoir où va les porter l'aventure. Le trait de Loustal se fait plus aérien grâce au passage de la plume au pinceau à encre, il donne vie avec beaucoup d'élégance aux années trente de Coatalem.
« Le cristal de Bayn », tome 2 de « La cicatrice du souvenir », par Ange et Paty. Chez Soleil.

C'est la quête d'Héroïc Fantasy classique, avec son trio de héros aux pouvoirs bien définis et complémentaires. Un prince injustement déchu de ses droits par son père. Un enfant magicien détenteur de pouvoirs séculaires, dernier survivant de sa caste. Et une belle guerrière qui succombe au charme du prince. Leur cause est juste, leur alliance nécessaire. Tout va pour le mieux, merci. Tout ? Au fur et à mesure qu'avance le deuxième album de cette série, on ne peut s'empêcher de ressentir un certain malaise. Est si les héros n'étaient pas tous aussi purs que prévu ? Les dernières pages semblent confirmer ce sentiment. La dernière en est la démonstration, brutale, parfaite aussi. Ange (Gérard et Anne Guéro) nous retourne comme une crêpe et redonne du tonus à ce récit aux apparences faussement évidentes. Décidément, les deux scénaristes ont beau se démultiplier, ils parviennent encore à nous surprendre. Quant à Christian Paty, à défaut d'être parfait, il est efficace de bout en bout.


« Cancrus Supremus », tome 1 de la série « Le collège invisible », par Ange et Donsimoni. Chez Soleil.

Et encore une nouvelle série pour Ange. Cette fois, on se croirait dans un remake de Harry Poter. Guillaume, élève magicien passé par magie (c'est le cas de le dire) du stade de cancre à celui de premier de classe, est un héros sympathique qui devrait plaire aux plus jeunes. Son amour pour les dragons lui vaudra de trouver en lui un courage insoupçonné pour affronter la Mal Absolu. C'est amusant, bien raconté, plein de petites trouvailles mais cela dégage tout de même un gentil parfum de déjà vu. Evidemment, il y a le dessin de Régis Donsimoni, qui possède une fraîcheur et une poésie bienvenues dans ce monde de brutes. Beaucoup d'humour aussi, puisque les trolls et les lutins de cette histoire sont assez lointains de l'imagerie classique. Bref, on n'est pas passé loin de la banalité, mais grâce aux qualités du trio qui oeuvre sur cette histoire, on l'a évitée.
Le captif par Thierry Bellefroid
« Le Captif ». Par Pellejero et Zentner. Chez Mosquito.

Les hasards de l'édition font que cette traduction française d'un livre datant de la première époque de collaboration entre Pellejero et Zentner paraisse au même moment que leur nouvelle série chez Casterman, « Aromm ». Cela permet évidemment de mesurer tout le chemin parcouru par le dessinateur depuis sa rencontre, au début des années 80, avec ce scénariste argentin. « Le Captif », c'est du Pellejero à l'ancienne, finesse d'exécution à la plume dans laquelle on sent tout l'héritage d'un Hugo Pratt. Certaines planches, plus aérées et spectaculaires, laissent présager de l'évolution que tout le monde connaît aujourd'hui. La toute dernière planche, par exemple, est particulièrement réussie. Mais s'il n'a pas encore choisi d'épaissir son trait au moment de dessiner cette histoire, Ruben Pellejero réussit pour autant parfaitement cette adaptation d'un récit hallucinant, celui d'un artilleur allemand retenu prisonnier dans un village cannibale du Nouveau Monde au XVIème siècle. L'histoire est véridique, elle a d'ailleurs été immortalisée à l'époque par un graveur, Maître Colben, que Jorge Zentner a choisi de montrer à l'oeuvre dans la BD. Le récit est donc celui que fait le rescapé au graveur qui va immortaliser ses aventures ; il oscille entre passé et présent et même, avec beaucoup de subtilité, il évite le détail des scènes les plus atroces en remplaçant leur transposition en BD par l'utilisation des gravures d'époques, plutôt allusives et désincarnées pour le lecteur d'aujourd'hui. L'histoire est passionnante et le traitement brillant : il aurait donc été dommage de ne pas en faire profiter les lecteurs francophones. Grâce à Mosquito, cette « injustice » est désormais réparée.
Destins nomades (Âromm) par Thierry Bellefroid
« Destins nomades », tome 1 de la série Aromm, par Zentner et Pellejero. Chez Casterman.

Même si Jorge Zentner a récemment multiplié les projets de séries avec d'autres dessinateurs, il n'avait jusqu'ici pas franchi le cap avec son vieux complice, Ruben Pellejero (si l'on excepte Dieter Lumpen, mais on ne peut pas vraiment parler de série). Aromm est donc leur première expérience du genre en commun et l'on peut dire que l'essai n'est pas totalement concluant. Passons d'abord en revue les points positifs. Le dessin de Pellejero est remarquable, son trait toujours plus épais possède une puissance évocatrice magistrale et sa mise en couleur dope réellement le dessin. Quant à l'écriture de Zentner, même si elle peut parfois lasser par son côté répétitif, elle recèle une qualité intrinsèque indéniable. Ce n'est déjà pas si courant. En revanche, si leurs précédents albums excellaient dans la concision et la densité, ce premier Aromm pêche par un excès de dilution. Qui plus est, il est très vite lu et laisse le lecteur sur une impression de vide assez déplaisante. Le genre de lecture vite oubliée ; on s'en rappelle avec le vague sentiment d'avoir caressé un dessin magnifique et des ambiances envoûtantes. Reste que ce monde mythologique qui mêle les steppes mongoles aux rites chamaniques moins définis plaira sans doute à tous les fans de ce duo talentueux.
Le totem des Cynos (Aquablue) par Thierry Bellefroid
« Le totem des Cynos », tome 9 de la série Aquablue, par Cailleteau et Tota. Chez Delcourt.

Sous l'influence de Ciro Tota, Aquablue est plus écolo que jamais. On finirait même par oublier son côté aventurier galactique tant la série semble prendre un tour « familial ». D'ailleurs, sans dévoiler trop « la » surprise de ce neuvième tome, sachez que Nao ne va pas tarder à jouer les Thorgal ou les Buddy Longway de la SF. Malgré ce changement de cap, la lecture de cet album reste agréable et délassante. Mais n'est-ce pas un peu court pour une série que les cinq premiers volumes avaient placée au plus haut ? C'est vrai, le lecteur a le sentiment d'être face à un ersatz de ce qu'il a connu jadis. La plupart des personnages manque d'épaisseur et de nuances, l'humour reste sans doute la seule chose plus ou moins constante depuis les débuts et les thèses écolo sont mises tellement en avant qu'on aurait presque envie d'aller jeter sa poubelle sur la rue, juste pour faire un peu barrage aux bons sentiments...
« Regarde au-dessus des nuages », tome 17 de la série Buddy Longway, par Derib. Au Lombard.

Au Lombard, on aime aller rechercher les vieux héros fatigués et leur donner une nouvelle jeunesse. Après Jonathan, c'est Buddy Longway qui nous fait le coup du come back retentissant. Treize ans d'absence et Derib nous balade sur 48 pages comme s'il s'était passé trois minutes entre « Le dernier rendez-vous » et ce « Regarde au-dessus des nuages ». Drôle d'effet ! L'album est truffé d'allusions au reste de la série, astérisques avec renvoi en bas de page et personnages resurgissant du passé. Pour le reste, Derib nous raconte sa version de « L'homme qui murmurait à l'oreille des chevaux ». Et les chevaux, il les dessine comme Franz, les yeux fermés ! Autrement dit, il est dans son élément et ça se sent. L'univers écolo-familial de Derib paraît aujourd'hui tout ce qu'il y a de normal. Mais il faut se rappeler qu'à ses débuts, il faisait figure de précurseur avec cette BD hors-norme. Les nostalgiques apprécieront donc cet exercice de « résurrection » à sa juste mesure. Les autres regretteront que, comme toujours, la lecture d'un Buddy Longway n'excède guère les quinze minutes...
« Le destin de Jasper Unluck », tome 1 de la série « Séminole », par Rocca et Cassini. Chez Soleil.

Après s'être fait les dents sur « Bouffe Doublon », le duo Rocca-Cassini passe à la vitesse supérieure. Le thème développé dans cette nouvelle série a au moins le mérite d'être original. Une histoire d'Indiens sans cow-boys, qui nous parle d'un peuple farouche en révolte avec le pouvoir américain à la frange sud du territoire, la Floride. On n'est pas loin des plantations de coton, l'un des trois héros est d'ailleurs le fils d'un riche planteur. Mais il y a en outre la proximité de Cuba et des contrebandiers, les marais de Floride et leurs sauriens redoutables, les esclaves noirs en fuite... Un sacré mélange qui place ce récit sur les Séminoles quelque part entre Blueberry, les albums mexicains de Durango et Barbe-Rouge. Le tout dans la première moitié du XIXème siècle, sur fond d'histoire d'amour impossible entre la fille du grand chef des Séminoles et trois prétendants aux objectifs inconciliables. Un bon récit d'aventure plein de rebondissements, qui pêche par quelques ellipses vraiment violentes (on reconnaît à peine le héros d'une case à l'autre tellement il a vieilli physiquement) sans que cela ôte le plaisir de la lecture. Cassini a fait de beaux progrès depuis ses débuts mais son trait hésite encore parfois un peu trop entre le réalisme et la caricature.
« On peut toujours discuter ! », tome 5 de la série Rat's, par P'tiluc. Aux Humanos.

Des rats, des crapauds et cette fois... des castors. Il n'en faut pas plus à P'tiluc pour nous concocter une farce hilarante qui se moque des soi-disant peuples civilisés avec une joyeuse démesure. Pour asservir les castors trois fois plus grands qu'eux -mais semble-t-il beaucoup moins intelligents- les rats adoptent la même technique que les Américains avec les Indiens : eau de feu et bouffe à gogo. Pendant ce temps, P'tiluc délire en se servant des crapos comme de vulgaires chewing gum. Ca gicle dans tous les coins et à certains moments, on se croirait dans un de ces dessins animés de Tex Avery où rien ne peut jamais détruire les personnages qui, même après avoir éclaté en mille morceaux, se recomposent et repartent à l'attaque. C'est joyeux, farceur, mais pas complètement innocent. Parfois, on aimerait que les Indiens -heu, pardon, les castors- arrêtent de parler petit nègre. Mais bon, pour le reste, qu'est-ce qu'on s'amuse.
20 précédents - 20 suivants
 
Actualité BD générale
Actualité editeurs
Actualité mangas
Actualité BD en audio
Actualité des blogs des auteurs
Forum : les sujets
Forum : 24 dernières heures
Agenda : encoder un évènement
Calendrier des évènements
Albums : recherche et liste
Albums : nouveautés
Sorties futures
Chroniques de la rédaction
Albums : critiques internautes
Bios
Bandes annonces vidéos
Interviews d'auteurs en videos
Séries : si vous avez aimé...
Concours
Petites annonces
Coup de pouce aux jeunes auteurs
Archives de Bdp
Quoi de neuf ?
Homepage

Informations légales et vie privée

(http://www.BDParadisio.com) - © 1996, 2018 BdParadisio